Gratuités et Systèmes d’Échanges Locaux (SEL)
Vincent Liegey
Comment sortir d’une logique de marchandisation et inventer, dans les territoires, d’autres formes d’autonomie et d’autres manières d’échanger en se basant sur le concept du « don – contredon » et sur l’économie de la réciprocité ?
C’est à dire une économie qui motive l'investissement en fonction de critères éthiques, et promeut une sortie de la croissance quantitative vers un bien-être qualitatif par le consensus démocratique, davantage pour le bonheur de chacun et la liberté de tous que pour la jouissance et le pouvoir des uns sur les autres.
Il semble en effet nécessaire de revenir à l’essence même de l’économie – economos, c’est à dire la gestion de la maison - pour tendre vers plus de bon sens, pour revenir à une économie réelle et non pas uniquement basée sur les profits.
Inventer dans les territoires d’autres formes d’autonomie et d’autres manières d’échanger pour sortir de la marchandisation du monde et revenir à l'essence de l’économie : gérer avec bon sens ce dont on a besoin pour vivre bien
Vincent Liegey
MON IDEE
Il s’agit de développer, en sus du revenu de base, deux autres modèles économiques alternatifs et parallèles.
Ces modèles reposent sur un ensemble de gratuités et des systèmes d’échanges locaux alternatifs (SEL), notamment avec la création de monnaies locales.
Les gratuités proposées, qui reposent sur des choix politiques, pourraient être les suivantes :
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Services funéraires : mettre en place la gratuité des services funéraires (cette période très particulière de surmortalité due au coronavirus en renforce l’évidence). Cela permet de transformer culturellement notre rapport à ce service, de le dé-marchandiser et d’étendre cette réflexion à d'autres choses qui nous paraissent fondamentales en termes de service public
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Système de santé, pour toutes et tous, sur la base d’une gratuité politiquement construite : on fait le choix de s’organiser pour pouvoir le financer pour que le système de santé réponde aux besoins que l’on considère comme essentiels
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Éducation : au-delà de l’école traditionnelle, concevoir une “école de la vie” en lien avec la reconversion de personnes dont les emplois vont disparaître. Gratuité d’accès à l’apprentissage de savoir-faire qui nous paraissent importants (exemples : jardinage/agriculture)
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Transports : s’inspirer de l’exemple des associations autour du vélo qui demandent le financement de l’accès au vélo et de son entretien. Le vélo s’avère le moyen de transport compatible avec la crise sanitaire du coronavirus, il est vertueux sur le plan environnemental et convivial !
La création de monnaies locales relève davantage d’une dynamique de délibération citoyenne et de construction collective et doit donc s’inscrire dans un dialogue continu ayant vocation à recréer du lien social et de la confiance sur le territoire.
Ces monnaies locales seraient utilisées pour payer certains biens et services considérés comme essentiels (ex : nourriture, services de proximité, masques). Cela permettrait de les dé-marchandiser et donc de sortir de la logique de profit.
QUI EST CONCERNE ?
L’ensemble des citoyens d’un territoire ainsi que leurs élus, susceptibles de mener une expérimentation de cette nature, en y impliquant l’ensemble des acteurs et parties prenantes du territoire.
BIO
Ingénieur de formation et doctorant à l'université d'économie de Budapest sur la Décroissance, Vincent LIEGEY se définit comme "objecteur de croissance" et défenseur d'une société soutenable et souhaitable où l’économie est au service du bien-être social. Chercheur indépendant, essayiste et conférencier, membre du parti de la décroissance, co-auteur en 2012 du livre Un projet de Décroissance, il a co-fondé Cargonomia, un projet collectif au sein duquel il expérimente un modèle économique alternatif qui s'appuie sur le local, l'économie de la réciprocité, devenant ainsi un terrain de recherche appliquée sur la transition et la décroissance.